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Présentation de l'étude à Berlin le 23 mai 2024 : Sybille Seitz (modératrice), Astrid Ley (mémorial et musée de Sachsenhausen), Florian Bruns (historien de la médecine), Thomas Beddies (comité scientifique de l'étude) et Peter Selg (co-auteur)
Présentation de l'étude à Berlin le 23 mai 2024 : Sybille Seitz (modératrice), Astrid Ley (mémorial et musée de Sachsenhausen), Florian Bruns (historien de la médecine), Thomas Beddies (comité scientifique de l'étude) et Peter Selg (co-auteur)

Communiqué de presse -

Exploitation au profit de l‘édification de l‘État nazi >>> Étude sur le milieu médical anthroposophique sous le national-socialisme

Goetheanum, Dornach, Suisse, le 31 Octobre 2024

Le milieu médical anthroposophique a largement résisté à l‘idéologie national-socialiste, notamment sur le fond. Certains médecins ont espéré en retirer des avantages au bénéfice de la médecine anthroposophique et se sont laissé entraîner dans le système. C‘est la conclusion d‘une étude menée par Peter Selg, Susanne H. Gross et Matthias Mochner.

En Allemagne, à l‘époque du Troisième Reich, le milieu médical anthroposophique a dû, lui aussi, définir sa position par rapport à l‘État national-socialiste. Peter Selg (professeur d‘anthropologie médicale et d‘éthique, et membre de la Direction du Goetheanum), Susanne H. Gross (historienne) et Matthias Mochner (historien) ont examiné les relations institutionnelles et personnelles présentes dans ce milieu. Le terme de ‹ médecin anthroposophe › n‘existant pas encore à l’époque, l‘équipe a recherché qui faisait partie à ce moment-là du monde médical anthroposophique, qui était lié au régime nazi et dans quelle proportion.

Ont été dépouillés des documents issus de plus de deux cent cinquante archives publiques et privées et comprenant des documents administratifs, des successions et des articles de revues spécialisées. Les auteurs ont aussi exploité des sources jusqu‘alors inconnues et établi les micro-biographies d‘une sélection de médecins anthroposophes.

Leur conclusion est qu‘il n‘y a pas eu d‘ajustement « aux modes de pensée et à la terminologie de la politique et de la médecine nazies ». En comparaison avec la population allemande, le milieu médical anthroposophique fut moins engagé que la moyenne dans les structures nationales-socialistes. Médecin anthroposophe de premier plan, Ita Wegman reconnut très tôt les dangers du national-socialisme, s‘engagea pour la préservation de toutes formes de vie et facilita la fuite d‘enfants, d‘adolescents juifs et de collègues. D‘après les documents disponibles, l’étude constate que ses collègues juifs « ne subirent pas d‘exclusion marquée au sein du corps médical anthroposophique, mais bénéficièrent majoritairement de soutien et de solidarité ». D‘autres médecins et étudiants en médecine anthroposophes « participèrent également à des activités médicales et politiques en lien avec la résistance ».

Certains médecins anthroposophes, dont Wilhelm zur Linden, espéraient que leur lien avec l‘État nazi profiterait à la médecine anthroposophique. Friedrich Husemann aspira tout d‘abord à « une organisation anthroposophique de médecins intégrée dans l‘État nazi ». Elle devint une composante de la Communauté de travail du Reich pour une « nouvelle médecine allemande » mais elle ne joua pas de rôle identifiable « pendant la courte période de son existence, de mai 1935 à janvier 1937 ». Les auteurs de l‘étude montrent qu‘au Goetheanum, sans être lui-même un nazi déclaré, le trésorier Guenther Wachsmut crut à la possibilité de « faire reconnaître les institutions et les initiatives anthroposophiques au sein du régime nazi ». Il y eut en outre des personnes, comme Hanns Rascher, nazi et membre du service de sécurité, qui, en tant que ‹ médiateur ›, exerça une influence sur les deux camps.

Du côté de l‘État nazi, on note de l’intérêt pour certains aspects de l‘anthroposophie. Otto Ohlendorf, de l‘Office central de sécurité du Reich, s‘engagea ainsi jusqu‘en 1941 « notamment en faveur du maintien des établissements de pédagogie curative, des écoles Steiner-Waldorf, des fermes biodynamiques et peut-être aussi de Weleda ». Alfred Baeumler, Otto Ohlendorf et d‘autres furent cependant « contestés au sein de l‘élite dirigeante nazie ». Les trois auteurs soulignent en outre que « les expériences sur les humains menées par Sigmund Rascher dans le camp de concentration de Dachau n‘eurent aucun arrière-plan ni aucune motivation d‘ordre anthroposophique ». Il fut cependant membre de la Société anthroposophique et « l‘un des représentants anthroposophiques les plus connus du diagnostic précoce du cancer ».

L‘ouvrage montre par ailleurs qu’Alfred Baeumler et Otto Ohlendorf eux-mêmes « ne se soucièrent jamais de la reconnaissance de la médecine anthroposophique, de la pédagogie Waldorf ou de l‘économie biodynamique », mais « de leur exploitation au profit de l‘édification de l‘État nazi ». Dans toutes les expertises du service de sécurité, il est question du fait que « [Rudolf] Steiner et les anthroposophes, par leur refus de toute pensée et de toute action antisémite, ou incluant une assise biologique de nature raciste, sont en opposition totale avec le national-socialisme ».

L‘étude a été commandée en 2016 par l‘Académie de la Société des médecins anthroposophes en Allemagne. Elle a été accompagnée par un conseil scientifique composé de Thomas Beddies et Heinz-Peter Schmiedebach de l‘Institut d‘histoire de la médecine et d‘éthique médicale de l‘hôpital de la Charité de Berlin. Les trois volumes qui la composent ont trait à la médecine anthroposophique sous le national-socialisme, au comportement des entreprises Weleda et Wala ainsi qu‘à la psychiatrie anthroposophique et aux foyers de pédagogie curative.

L‘étude a été financée par la Fondation Mahle, la Fondation Software AG, la Fondation Christophorus, la Fondation Hauschka, le Fonds Rudolf Steiner pour la recherche scientifique et Gabriele Christine Gomille-Dömling (1925-2018).

(5278 caractères/SJ; traduction : Jean Pierre Ablard)

Livre (en allemand) Peter Selg, Susanne H. Gross et Matthias Mochner, Anthroposophie und Nationalsozialismus. Die anthroposophische Ärzteschaft, Schwabe-Verlag, 2024 (non traduit)

Personne contact Peter Selg

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Le Goetheanum est le siège de l'École supérieure de science de l'esprit et de la Société anthroposophique du monde entier. L'École supérieure de science de l'esprit, avec ses onze sections, est active dans la recherche, le développement, l’enseignement et la mise en pratique de ses résultats et est soutenue dans ses travaux par la Société anthroposophique.
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